Vendredi 18 novembre, les députés ont entériné le prélèvement à la source, rendant plus que jamais concrète la dernière réforme d’un quinquennat mouvementé en matière de fiscalité !
Choc de simplification ou véritable tsunami, cette réforme est-elle celle dont a vraiment besoin le système fiscal français ?
        

En quoi cette réforme a-t-elle du sens ?
« Bien souvent pointé comme obsolète, le système de perception de l’impôt français recèle certaines failles, notamment son décalage entre le moment où les revenus sont perçus et le moment où l’impôt est payé. Aujourd’hui, dans un monde en perpétuel mouvement, la linéarité des situations personnelles et professionnelles n’est plus la norme. Rendre l’impôt plus réactif est donc une nécessité.
Notons que la France reste aujourd’hui l’un des derniers pays (avec la Suisse) à ne pas avoir mis en place le prélèvement à la source, tous les pays de l’OCDE l’ayant déjà instauré depuis maintenant de nombreuses années.
Grâce à cette réforme, la France s’inscrit donc, avec beaucoup de retard, dans la tendance générale. »

Marie Besche, Responsable de l’Ingénierie Patrimoniale  Magnacarta
 

Cette réforme est-elle réalisable dans notre millefeuille fiscal français ?
« Cette réforme est nécessaire…. Encore faudrait-il que notre « terreau » fiscal le permette !
Le prélèvement à la source nécessite une fiscalité simple, claire et transparente. Soit l’exact opposé de notre fiscalité actuelle. Il existe encore de trop nombreux modes d’imposition et des niches fiscales abondantes. Comme souvent, c’est parler d’une demi-réforme. Une réforme profonde et complète aurait, à mon sens, été nécessaire. Ici, le risque est de voir notre imposition se complexifier encore plus. »

Marie Besche, Responsable de l’Ingénierie Patrimoniale  Magnacarta

Quels sont les véritables enjeux de cette réforme ?
« Sous couvert d’un objectif louable, à savoir l’adaptation de l’impôt à la vie du contribuable, c’est véritablement les recettes de l’Etat qui seraient les grandes gagnantes. En régularisant l’impôt sur l’ensemble de l’année et en allant le chercher à la source, l’Etat s’assure des rentrées d’argent régulières et une diminution conséquente des fraudes et d’impayés.
Si ce rendement est véritablement le cœur du débat, rien ne servait de complexifier autant un système déjà sophistiqué, le prélèvement mensuel généralisé aboutirait au même objectif : permettre une avance de trésorerie à l’état tout en s’accommodant de notre fiscalité actuelle.
Cette solution a d’ailleurs été avancée par certains députés Républicains. »

Vincent COUROYER,Président Magnacarta

Le principe de l’année blanche est-il un simple argument marketing ?
« Enoncer que les revenus perçus en 2017 ne généreraient pas d’imposition a été un argument très bien perçu par le contribuable. Ce qui a surement permis d’occulter d’autres désagréments de la réforme tels que :
-    la confidentialité des informations
-    l’impact psychologique pour les salariés sur leur fiche de paye
-    la déclaration annuelle qui sera conservée
-    la non prise en compte des crédits d’impôt dans le calcul du taux d’imposition …
Cependant, dans les faits, le contribuable ne réalisera aucun gain de trésorerie ! Il paiera, en 2017, l’impôt sur ses revenus 2016, et sera redevable, dès le 1er janvier 2018 de l’imposition sur ses revenus 2018.
Attention, le projet de loi prévoit également des dispositifs anti-abus pour éviter que passent à la trappe certains revenus. Les revenus considérés comme « exceptionnels » par le texte seront donc imposés (plus-value mobilières et immobilières, intérêts, dividendes, gains sur stock options ou actions gratuites, …). »

Marie Besche, Responsable de l’Ingénierie Patrimoniale  Magnacarta

Quel impact aura l’année blanche sur la mise en place de stratégies fiscales ?
« Si le texte est voté en l’état, l’année blanche gommera certains atouts d’investissements fiscaux.
La bonne nouvelle, c’est qu’il est prévu que les réductions et crédits d’impôt ouverts au titre de 2017 soient maintenus et intégralement versés au moment du solde de l’impôt, à la fin de l’été 2018.
En revanche, la question est plus délicate concernant les investissements permettant de diminuer son revenu imposable. Sont notamment visés les cotisations au titre des produits retraite (type PERP) ou les travaux réalisés dans des propriétés bâties. En l’état actuel, ces investissements seraient en partie inopérants sur l’année 2017. Quelle solution adopter alors ? Anticiper les dépenses sur 2016 ou attendre 2018 si cela est possible.»

Marie Besche, Responsable de l’Ingénierie Patrimoniale  Magnacarta

Croyez-vous à la promesse des Républicains de revenir sur cette réforme dans le cas où leur candidat serait investi ?
« Le gouvernement de François Hollande fera tout pour faire passer cette réforme dans le cadre de la loi de Finances pour 2017. S’il est donc voté, le prélèvement à la source devra être appliqué. Mais n’oublions pas dans quel contexte politique il s’inscrit. Les deux candidats Républicains en lice pour la Présidence de la République, François Fillon et Alain Juppé, ont été clairs : ils suspendront cette réforme.
On peut s’étonner de cette position, car le prélèvement à la source a aussi, par le passé, été porté par la droite. Plus que l’idéologie même de cette réforme, il semblerait donc que la droite s’oppose surtout à la manière dont elle a été menée.
Promesse électorale ou véritable volonté ? Rendez-vous en mai 2017. »

Vincent COUROYER, Président Magnacarta

Au vu des changements notables que le prélèvement à la source soulèvera, l’accompagnement que prodiguent déjà les conseillers en gestion de patrimoine en tant qu’experts fiscalistes auprès de leurs clients, se confirmera dans les années à venir.